
L’assurance de responsabilité civile décennale également appelée garantie décennale garantit la réparation des dommages qui se produisent après la réception des travaux (fin officielle du chantier), sans attendre une décision de justice. Cette garantie concerne, ainsi, les vices ou dommages de construction susceptibles :
- d’affecter la solidité de l’ouvrage et de ses équipements indissociables (par exemple, effondrement résultant d’un vice de construction),
- ou qui le rendent inhabitable ou impropre à l’usage auquel il est destiné (par exemple, défaut d’étanchéité, fissurations importantes).
5 articles et conseils sur les notions de travaux et garantie décennale
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Les ancrages légaux et jurisprudentiels de la garantie décennale
La garantie décennale trouve un ancrage juridique dans l’article l’article 1792 du code civil.
Elle s’applique au « gros ouvrage » (c’est-à-dire les murs, la charpente, la toiture..), par opposition aux « menus ouvrages » que sont les éléments mobiles (portes et fenêtres, sanitaires…).
Dans les cas d’impropriété à destination, la garantie décennale peut aussi s’appliquer aux éléments d’équipement (par exemple une pompe à chaleur).
La jurisprudence a précisé ce que l’on pouvait entendre par « ouvrage » (cave, véranda, cheminée…), les conditions dans lesquelles on pouvait faire jouer la garantie décennale (malfaçons invisibles lors de la réception de l’ouvrage) et quel type de réparation on pouvait demander (remplacement des éléments défectueux, annulation d’une vente, dommages et intérêts…).
Exemples de décision de justice relative à la garantie décennale
La garantie décennale est applicable à une véranda « adossée à la façade de l’immeuble, formant un ensemble composé d’une structure, d’un clos et d’un couvert » (cass. civ. 3e ch. du 4.10.89, no 88-11962)
Elle s’applique aussi à une serre, bâtiment clos et couvert, « dont le mode d’implantation était une immobilisation par incorporation au sol de toute la structure porteuse » (cass. civ. 1re ch. du 2.3.99, no 96-20497)
Une maison mobile livrée par camion « simplement posée sans travaux ni fondations » ne constitue pas un ouvrage immobilier (cass. civ. 3e ch. du 28.4.93, no 91-14215).
Une véranda a été installée sur mon balcon. J’ai constaté des infiltrations d’eau, dois-je exiger de l’artisan qu’il remédie au problème d’étanchéité ?
Oui
Mais à certaines conditions : l’ouvrage dont il est question doit être ancré au sol par des fondations (mêmes si ces dernières sont peu profondes). La notion de structure fermée et couverte est importante. À ce titre la Cour de cassation a jugé que la garantie décennale pouvait s’appliquer à “une véranda adossée à la façade d’un immeuble” (cass. civ. 3e ch. du 4.10.89, no 88-11962). Ce n’est pas le cas d’une maison mobile qui sera livrée par camion et simplement déposée sur le sol sans fondation. Il ne s’agit pas là d’un ouvrage immobilier (cass. civ. 3e ch. du 28.4.93, no 91-14215). Pour ce qui est des éléments d’équipement d’une maison, la règle est la même : la garantie décennale ne s’appliquera pas si ces éléments peuvent être remplacés, démontés sans détérioration.
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Un des murs de ma maison se fissure suite à un affaissement de terrain ? Est-il possible d’avoir recours à la garantie décennale ?
Oui.
La responsabilité du constructeur s’étend jusqu’à l’état du sol. L’article 1792 du code civil indique que le constructeur engage sa responsabilité quant aux dommages causés par l’état du terrain sur lequel se situe la construction. Par constructeur, il faut entendre indifféremment l’architecte, le promoteur, le bureau d’études, l’artisan etc. Ainsi, un artisan qui ferait construire un immeuble près d’un talus friable sans avoir anticipé la nécessité d’un mur de soutènement du talus devient responsable en cas de complication (cass. civ. 1re ch. du 10.2.82, no 81-10851). Les constructeurs sont par ailleurs responsables des travaux qu’ils réalisent. Un câble électrique mal isolé sous la charpente d’un bâtiment fait du constructeur un responsable en cas d’incendie. Enfin, le constructeur “fournisseur” peut aussi se voir concerné si la qualité de ses matériaux est la cause de problèmes.
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Sur ma maison, l’apparition de fissures superficielles m’inquiètent. Puis invoquer la garantie décennale ?
Non.
La garantie décennale ne concerne que les dommages ancrés dans le sol d’une part, et qui menacent la structure de l’ouvrage d’autre part. Quand les fissures observables sur le mur d’une maison ne sont que d’ordre esthétique, la pérennité du bâti n’est pas remise en question et les dommages ne peuvent pas faire l’objet d’un recours via la garantie décennale. Néanmoins, il arrive que des défauts de construction, à première vue simplement d’ordre esthétique, constituent à terme un danger pour l’intégrité de l’ouvrage. Dans ces cas précis, la décennale peut fonctionner.
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L’installation du système de chauffage de ma maison neuve fonctionne mal, puis-je exiger une réparation complète ?
Oui.
Les tribunaux prévoient des recours possibles en cas d’édification d’ouvrage “impropre à sa destination”. Cela signifie que toute installation jugée défectueuse, notamment sur le chauffage (par exemple problème de rendement des pompes à chaleur…) est considérée comme dysfonctionnelle et l’habitat est déclaré comme inhabitable. Pour rester sur l’exemple du système de chauffage, si ce dernier marche correctement mais que son installation produit un bruit anormalement fort, un trouble est avéré. De la même façon, ces nuisances sonores justifient un recours pour le propriétaire. (cass. civ. 3e ch. du 10.7.84, no 83-12126)
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L’acquisition de notre appartement tourne au fiasco : aucune isolation phonique, peut on faire annuler la vente ?
Oui.
Selon la loi en vigueur, si une malfaçon est repérable le jour où l’acheteur fait l’acquisition du bien immobilier, la responsabilité du constructeur ne peut être mise en cause. En revanche, si la malfaçon est invisible et indécelable, le propriétaire sinistré peut faire jouer la garantie décennale. C’est le cas des mauvaises isolations que les habitants déplorent bien souvent après leur installation dans le logement. Un recours reste alors possible auprès des tribunaux.
Voir aussi :
La surprenante extension de la garantie décennale aux éléments d’équipement
Normes du bâtiment et malfaçons de la construction (corpus de lectures)